lundi 31 mai 2010

THE BLACK KEYS Brothers

Peu réceptif au blues en général, et ce malgré les sincères et nombreuses tentatives de vulgarisation en la matière en provenance des White Stripes (avec qui on les compare régulièrement) ou de Jon Spencer, j'avoue ne m'être jusqu'à présent jamais beaucoup attardé sur les disques des Black Keys. Il ne m'avait bien sûr pas échappé que les deux blancs-becs d'Akron avait fait produire leur précédente livraison (Attack & Release en 2008) par l'omniprésent sorcier Danger Mouse, et qu'ils eurent également fin 2009 l'heureuse initiative de convoquer la crème (érudite et plutôt old-school) du hip-hop américain, avec pour résultat le passionnant projet Blakroc, qui faisait suite au premier essai solo de Dan Auerbach (chanteur et guitariste du groupe).

Dire que Brothers, leur sixième album studio, eut sur moi l'effet d'une bombe relève de l'euphémisme. Pas une journée qui passe sans une écoute quotidienne depuis sa sortie. Il faut préciser que le duo de l'Ohio, en dignes héritiers de Junior Kimbrough (dont ils revendiquent l'influence et qui sorti également des disques sur Fat Possum Records), s'abreuve aux racines du blues et du rhythm'n'blues, mais aussi désormais à la source de la soul music. Everlasting Light inaugure les festivités sur une production bien grasse, tandis que Dan Auerbach et son acolyte Pat Carney à la batterie enchainent sur la première partie du disque plusieurs blues-rock songs bien torchées, à la production plus travaillée qu'à l'accoutumée (Next Girl, Howlin' For You ou She's Long Gone). Production qui devient tout simplement diabolique entre les mains de Danger Mouse sur l'énorme single Tighten Up que ne renierait pas Cee-Lo, son compère au sein de Gnarls Barkley. On sent d'ailleurs ici, à travers des fenêtres grandes ouvertes, une chaleur moite envahir la pièce, la voix de Dan Auerbach rivalisant soudain avec les grands soul brothers. Dès lors, et sur toute la seconde partie de Brothers, le ton est donné, de The Only One, superbe ballade amoureuse, jusqu'à la sublime reprise du standard soul Never Give You Up. Draguant l'univers des bandes originales tarantinesques sur Ten Cent Pistol et The Go Better (saupoudré de surf-guitar discrètes), le groupe de l'Ohio pousse l'insolence au point d'enfanter trois classiques instantanés de soul intemporelle : Too Afraid To Love, I'm Not The One et Unknown Brother.

En s'émancipant d'un héritage blues, auquel ils ont déjà largement rendu hommage, pour s'aventurer sur les terres de la soul music noire américaine, The Black Keys livre son meilleur album à ce jour. Le miracle qui se produit ici peut s'expliquer par cette forme d'intemporalité atteinte sur les compositions du groupe, qui transcende, avec le tout le respect dû mais aussi beaucoup de personnalité, le meilleur de la musique américaine du XXème siècle.
Cédric B
8,5/10


Paru le 17/05/10
(Nonesuch/PIAS)

http://www.theblackkeys.com/
http://www.myspace.com/theblackkeys

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The Black Keys - Tighten Up - Official Video from Chris Marrs Piliero on Vimeo.

Deux morceaux de Brothers en écoute dans le lecteur (en bas)

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